Le Viking de la lentille
Cet enfant de la Normandie nous vient d’Alençon. Où il grandit jusqu’à 17 ans avant de tenter sa chance à Paris. Dans une banque… Frustration ? Patrick oublie bordereaux et comptes clients le temps de vacances trop rares, qu’il sacrifie aux voyages, si possible lointains, si possible fixés sur la pelloche. Cela pendant près de 10 ans. Jusqu’à ce qu’il voyait venir dès longtemps : une année sabbatique. Elle le mène à travers états et provinces d’Amérique du Nord. Mais chaque jour il constate ses insuffisances côté objectif. Le violon d’Ingres bancaire devient vocation : Patrick embrasse la prêtrise dans les lofts de CE3P, une école photo-journalistique qui loge à Ivry, pas loin de la Seine. Forget reste un Normand, c’est-à-dire un rural, à l’inévitable penchant pour la mer – même quand on est d’Alençon ! Premiers revenus : il fournit en « images » guides Gallimard – dont les abondantes illustrations ont révolutionné les guides de l’époque. Forget en prend pour 20 ans… « Notre Temps », « Fig Mag », « Géo », « Le Point », « Historia », « Marie-Claire »… Il produit plusieurs livres, sur les soldats du feu ou les écorchés de Maison-Alfort… Qu’on lui lâche la bride, et Forget raconte des histoires – d’où le nom Sagaphoto qu’il a pris pour son agence, touche viking en prime -, en plusieurs photos ou en un seul cadrage. Les gens, les scènes de vie, le risque des contrastes porté jusqu’aux frontières du noir et blanc, les fenêtres des premiers plans, et l’obsession des reflets qui à eux trois sont sa marque de fabrique. « Ecrire avec la lumière, cela me convient bien », confie cet homme assez peu expansif. « Je travaille avec du matériel Canon, aussi un drone mais ça me semble secondaire ». Car ce qui est important, c’est qu’au terme de ses voyages, Patrick soit retourné à sa Normandie. Par Dominique de La Tour